PRESENTATION


Mots clés : contrôle tonique, système intégré
Entrées sensorielles/référentiels spatiaux individuels, canaux sensoriels, somesthésie
conflit sensoriel, illusion sensorielle
vicariance, suppléance perceptive

En France, six millions de patients consultent chaque année leur médecin parce qu'ils ont mal au dos. Hier mal de dos, aujourd'hui troubles musculo-squelettiques (TMS), les douleurs de l'appareil musculo-squelettique représentent ou représenteront l'essentiel de la demande thérapeutique en pratique libérale. Leur origine en est discutée et elle est probablement multifactorielle, mais il faut se souvenir à ce sujet:
1) que la première nécessité humaine est de disposer d'un certain tonus dans les muscles extenseurs pour résister au diktat de la gravité
2) qu'au plan vertébral les muscles axiaux antigravitaires sont aussi ceux qui tiennent les vertèbres.
Comment est élaborée cette fonction ? Qu'est ce qui peut perturber la distribution du tonus ? En cas d'anomalies, est ce que les contraintes inhérentes prédisposent l'individu aux lésions disco-vertébrales, aux lésions musculaires ? Est-il possible de pénétrer les mécanismes neuraux de régulation du tonus antigravitaire par voie manuelle ? Si muscles et squelette qui servent à se tenir debout sont très vite concernés, l'élaboration du tonus antigravitaire est multisensorielle, multimodale : quels autres appareils peuvent être atteints ? Quelle est l'étendue réelle des symptômes qui peuvent être rattachés à ce trouble initial ? Cela relève t'il de notre compétence ? etc. Autant de questions auxquelles nous devons répondre pour que la prise en charge de ces pathologies, trop souvent récurrentes, soit efficiente et donne des effets durables.

C'est une évidence d'écrire que l'Homme est un bipède au cerveau perché. Comment arrive t'il à résoudre une équation aussi difficile avec une extrémité céphalique portée par une chaîne polyarticulée complexe oscillant sur une surface d'appui limitée à celle de pieds qui apparaissent bien petits au regard du levier mécanique sus-jacent. Avant toute action, nous devons être capables d'évaluer la situation du corps dans l'espace puis de remesurer les conséquences de l'action pendant son exécution et aussitôt après, avant de penser à la suivante et ainsi de suite. Cet exercice ne peut être que le fruit d'une organisation neurologique complexe. Le cerveau humain est par ailleurs doté de fonctions cognitives qui lui permettent de faire la différence. Il ne travaille pas comme un ordinateur sur de l'information pure, mais sur le sens qu'il peut et/ou veut lui donner. Il passe donc son temps à interpréter le dialogue permanent entre les milliards de récepteurs sensoriels disséminés dans le corps et les organes des sens pour construire des images virtuelles (schèmes corporels) qui correspondent à la représentation mentale du corps à ce moment donné. Via la libération de neuromédiateurs par les synapses de ses circuits neuronaux (cartes corticales), le SNC configure le corps pour l'action. Lorsque les événements obligent à rectifier l'économie de ce système, chaque thérapeute doit se poser la question de savoir si les techniques dont il dispose sont les plus appropriées pour modifier le fonctionnement de ces circuits de régulation.
Si nous voulons exister en tant que bipède, nous devons donc connaître à tout moment les positions relatives des différentes parties de son corps les unes par rapport aux autres et la position de son corps dans l'environnement. Cette prise de références neurosensorielles, à l'intérieur et à l'extérieur du corps, s'avère indispensable pour stabiliser et orienter le corps dans l'espace avec un maximum de fiabilité et un minimum de coût énergétique. Le cerveau est alors libre de se consacrer à la meilleure exécution possible du répertoire de tâches. Le système nerveux étant un système hiérarchisé : étudier les tenants et aboutissants de ce maintien postural revient donc à analyser le poids fonctionnel des trois boucles neuronales (capteur sensoriel - voies afférentes - circuits centraux d'intégration - voies descendantes - effecteur musculaire - réafférences de l'interaction corps/environnement) directement impliquées dans la régulation du contrôle postural : boucle visuelle, boucle vestibulaire, boucle somesthésique.

Stabilisation et orientation spatiale du corps impliquent de prendre des références extracorporelles pour avoir une image stable de l'environnement, aussi bien en station debout simple que dans l'exécution de mouvements complexes. L'oil (vision rétinienne centrale et périphérique) offre une représentation centrale 3D de l'environnement et détermine la verticale visuelle subjective (VVS). Il présente cependant l'inconvénient de tourner dans l'orbite. Il reçoit dont l'appoint des capteurs inertiels de l'appareil vestibulaire (canaux semi-circulaires et système otolithique) pour autoriser une stabilisation très précoce de l'image sur la rétine et du regard par leur couplage avec les muscles optomoteurs lorsque la tête bouge, sous le contrôle du système oculolabyrinthique (S.O.L). Si l'appareil otolithique utriculaire assure l'essentiel de la stabilisation posturale (verticale posturale subjective/VPS), les canaux permettent la stabilisation de l'environnement sur la rétine par l'intermédiaire du réflexe de contre-rotation oculaire (VOR) et du nystagmus optocinétique (OKN). L'oculomotricité adapte en permanence le regard aux besoins de la vision binoculaire, ainsi que la position de l'oil dans l'orbite face aux contraintes positionnelles posturales et/ou aux intentions motrices.

Le référencement endogène est issu de la somesthésie. Les contacts de la peau, les frottements, les tensions générées par les oscillations et les mouvements.facilitent les voies sensorimotrices et informent le cerveau sur la situation du corps par rapport au couple oil-labyrinthe. Extéroception (peau), proprioception (muscles, tendons, articulations..), graviception viscérale abdominale, proprioception fasciale et dure-mèrienne.concourent à donner au SNC une appréciation de la situation du corps par rapport à la verticale de gravité (= verticale haptique subjective/VHS) et par rapport au couple oil-labyrinthe. Ce qui est intéressant pour nous, c'est que le canal somesthésique semble de plus en plus être considéré comme le maillon essentiel du contrôle posturo-cinétique. Dans ce domaine, si le rôle joué par les fuseaux neuromusculaires et les OTG des fibres toniques des muscles antigravitaires (système ?) et des fibres phasiques (motoneurone a) est habituellement considéré essentiel (Sherrington, Roll, Da Silva..), des travaux récents laissent entendre qu'il est vraisemblable que la peau joue un rôle largement sous-estimé: peau de la plante du pied dans l'orientation spatiale du corps (Kavounoudias, Roll) peau périarticulaire et périmusculaire dans le codage des degrés de liberté articulaire (Moberg, Edin, Olausson..). Rabischong allant même jusqu'à dire que peau et vision suffisent à se tenir debout.

Les signaux de ces référentiels spatiaux convergent vers des structures spécialisées du SNC qui y répondent, soit de façon réflexe (boucles courtes), soit après avoir pris le temps de les intégrer en les comparant et en les liant (boucles longues) : intégration et réponses sont très largement dépendante du contexte environnemental et en particulier des conditions gravitaires.

 


Maturation du système
Les bébés n'ont pas besoin de tourner les pages d'un quelconque mode d'emploi pour passer du stade de petit d'homme à celui de petit Homme, parce qu'ils sont génétiquement précablés pour vivre sur deux pieds. Ceci dit, l'humain n'est pas terminé à la naissance ; c'est un animal tardif et ce n'est qu'au prix d'un apprentissage périlleux doublé de l'observation des plus grands que la fonction bipédique est progressivement acquise puis maîtrisée à l'âge adulte, avant de devenir à nouveau problématique avec le vieillissement des structures et des fonctions. Le programme posturo-cinétique, tant dans sa mise en place initiale que dans son actualisation, est le fait de toute une vie : nous sommes donc amenés à recevoir des patients de tout âge. L'instabilité et la chute du sujet âgé devenant d'ailleurs un fait de société dont nos professions doivent d'autant plus se préoccuper que la durée de vie s'allonge constamment. Le caractère des manouvres d'orthopractie permet d'aborder ce type de patients sans aucun des risques habituellement liés à l'âge.

Par ailleurs, cette maturation du système de contrôle ne se fait pas de façon linéaire mais par tranches d'âge et elle n'est pas identique pour tous les individus. L'évolution des capacités sous-entend que le programme génétique de base n'est pas suffisant. Au fil du temps, il est actualisé en permanence par l'apport des innombrables volées d'informations issues des organes des sens spécialisés (yeux, oreille interne, soma). Les informations sont traitées par des centres supra-spinaux spécialisés qui déterminent autant de représentations du corps par rapport à la verticale de gravité que d'organes des sens. Ils élaborent au fil des apprentissages un droit devant référent biologique qui sert de base fondamentale à l'élaboration de routines et de modélisation des situations qui autoriseront le cerveau à préprogrammer l'adaptation aux besoins (Ajustements Posturaux Anticipés). Quand le cerveau peut superposer, comme il s'y attend, les verticales mesurées {visuelle, posturale et haptique} en une représentation unique et cohérente du corps dans l'espace, tout est pour le mieux: droit devant géocentré (actualisation en temps réel) et droit devant référent biologique sont congruents. Le caractère intermodal de l'intégration cérébrale permet alors à l'individu de se tenir debout au plus près du zéro gravitaire et le libère pour accomplir son répertoire de tâches (en particulier cognitives) le plus rapidement et le plus parfaitement possible avec un minimum de dépense d'énergie. En temps normal, on ne s'occupe de rien; le système fonctionne essentiellement en mode nonconscient. {C'est comme ça que vous pouvez lire le journal en marchant dans la rue. Ne pas s'occuper de la façon dont les pieds se posent sur le sol ou de la façon dont le corps est stabilisé vous permet d'engrammer la trace mnésique des articles de presse suscitant votre intérêt. Le système vous offre malgré tout la possibilité de débrancher le cognitif à la demande pour reprendre une maîtrise corticale (volontaire) du pilotage si vous avez besoin de changer de pas, de direction... Il en va tout autrement s'il s'agit accomplir le même effort cognitif en marchant sur un terrain glissant}. Entendues en permanence par le cerveau, ces données neurosensibles sont liées et intégrées en fonction des besoins ; c'est ainsi qu'en décubitus, la nuit, entrées sensorielles et analyseurs fonctionnent toujours mais ne sont pas écoutés par le SNC puisque le corps n'exprime aucun besoin antigravitaire.

Ces mécanismes sont donc le fait de circuits neuronaux courts (réflexes) et/ou longs (intégrés) qui voient l'information neurosensorielle née dans les récepteurs périphériques converger vers des centres sous-corticaux et corticaux hiérarchisés pour y être intégrée de manière multimodale afin d'élaborer une commande exécutée par les moteurs musculaires toniques (posture) et /ou phasiques périphériques (locomotion, mouvement) . avec le support congruent des mécanismes vitaux de régulation homéostasique du système neurovégétatif. (Quid d'un sujet alité au-delà d'un certain temps, expériences de «Bed-rest ».)

 

Conflits sensoriels et syndromes de désorientation spatiale
Le problème, c'est qu'apparemment il peut arriver que le programme ne se déroule pas comme prévu et que l'élaboration centrale des routines exécutées par la périphérie fasse l'objet de biais. Pourquoi ?
1) Parce que le cerveau n'est pas un ordinateur travaillant sur des signaux neurosensoriels purs, mais avant tout sur le sens qu'il peut/veut donner à l'information
2) Parce que les organes des sens (yeux, oreille interne, soma) ont tous une capacité étonnante à tromper le cerveau, à le rendre victime "d'illusions" sensorielles ou, à tout le moins, à lui transmettre des informations erronées sur la relation du corps à l'environnement. Aucun des sens impliqués dans le contrôle postural n'y échappe.
Dès lors, entre un cerveau volontiers manipulateur et un cerveau manipulé par des infos sensorielles erronées, le jeu de l'intégration et de l'élaboration des routines peut vite poser problème. Chez l'enfant en maturation, les différentes stratégies ne peuvent se mettre normalement en place et peuvent perturber la morphogenèse voir l'ontogenèse, puisque certains auteurs soutiennent que des défauts d'apprentissage peuvent y être corrélées. Chez l'adulte, les stratégies acquises perdent leur efficience, les possibilités de compensation disparaissent: l'appareil musculosquelettique a largement le temps de souffrir de la désorientation spatiale qui accompagne le conflit sensoriel. L'âge avançant, perte de plasticité du SNC et raideurs mécaniques contrarient d'autant la mise en place de nouvelles stratégies. L'adulte exprime une souffrance plurielle.

 

 

 

 

 

 

Concrètement, quand un conflit sensoriel (oeil droit/oil gauche, oil/oreille interne, oil/soma, bouche/oreille interne.etc..) vient perturber le traitement des données neurosensorielles, la première réponse du cerveau est de s'adapter aux nouvelles conditions puis de réorganiser sa connectique fonctionnelle dans la durée puisqu'il dispose de plasticité. Mais dans ces circonstances, il le fait malheureusement dans l'erreur et cette capacité à s'adapter passe d'autant plus du statut de qualité à défaut que le pilote de la machine ne peut s'en rendre compte. Apparaît alors insidieusement un biais que le malade ne peut pas corriger spontanément, non seulement parce que son cerveau conditionne son adaptation à ce qu'il prend pour une vérité perceptive alors qu'elle n'est en réalité qu'une erreur sensorielle, mais aussi parce que la perception instantanée l'emporte toujours sur la connaissance.

La meilleure volonté n'y peut rien et si le sujet n'a pratiquement aucune chance de prendre conscience du conflit, il n'en a pas davantage de s'en sortir tout seul. Notre premier travail est donc de matérialiser à ses yeux l'existence du/des conflit(s) sensoriel(s).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Après Vierordt, Flourens, Longet, De Cyon, Baron et bien d'autres dans les prémices de la discipline, c'est probablement en anticipant sur ce modèle que le Dr H. Martins da Cunha (Lisbonne) s'est interrogé dès les années 70 sur l'origine et la variété des signes cliniques de certains patients consultant pour des troubles musculosquelettiques qui disparaissaient avec le port de prismes oculaires pourtant sensés aggraver leur problème au plan strabologique. Il a regroupés ces symptômes sous le terme de Syndrome de Déficience Posturale (SDP), pendant qu'à la même époque, le Dr P.M Gagey (Paris) croisait les observations antérieures du Prof. P.Marie chez les blessés crâniens de la 1ère guerre mondiale avec la symptomatologie des porteurs de Syndrome subjectif des traumatisés crâniens (SSTC) qu'il côtoyait, pour jeter les bases de la posturologie clinique actuelle.

Le Syndrome de déficience posturale (S.D.P) (Dr M. Da Cunha)
Troubles du tonus musculaire
Troubles du tonus vasculaire
Troubles neurosensoriels
Troubles de la somatognosie
Troubles des apprentissages intellectuels
Troubles du système limbique

Selon Da Cunha, c'est l'incapacité du système nerveux central à traiter et à intégrer de façon intermodale les informations sensorielles qui entraîne l'apparition d'un syndrome de désorientation visuo-spatiale aux troubles fonctionnels aussi disparates.

Modèle sensorimoteur versus modèle structurel
Au plan musculosquelettique, tout écart avec la représentation du zéro gravitaire (perte de congruence entre droit devant référent biologique et droit devant égocentré) se traduit par une anomalie de recrutement des muscles antigravitaires qui font ce qu'ils peuvent pour rattraper la chute relative du corps : facilitation unilatérale des fibres toniques, inhibition controlatérale ; recrutement de fibres phasiques pour suppléer les fibres toniques qui s'épuisent à courir après le zéro gravitaire. Les troubles musculosquelettiques sont rapidement au rendez-vous.Au plan plus précis de la musculature axiale, asymétrie de répartition du tonus et blocage en décharge des fibres toniques créent des précontraintes anormales sur les UFV (Unités Fonctionnelles Vertébrales) : lésions ostéopathiques, DIM, subluxations chiropraxiques ou plus simplement atteinte anatomo-fonctionnelle du collagène intradiscal sont au rendez-vous. Cette approche permet de comprendre nombre d'échecs et de rechutes aux traitements manipulatifs ou médicamenteux ou encore expliquer pourquoi des manipulations structurelles de direction opposée (lois de Fryette et loi de la non douleur de Maigne) peuvent donner des résultats identiques. Il apparaît aujourd'hui plus que probable que la « lésion structurelle » doit être, dans une très large majorité de cas, considérée comme la résultante d'un défaut de codage des informations neurosensorielles par le SN et non le contraire : « le mou et sa commande précèdent le dur » comme l'élaboration du geste précède son exécution. Qui peut d'ailleurs se vanter d'avoir déjà vu un corps humain avec des os bouger tout seuls, ou encore deux os formant une articulation être auto stables... ? À l'évidence, il n'en va pas ainsi. Cela impose la présence d'actionnaires musculaires qui ont eux-mêmes besoin d'une commande. Dans le meilleur des cas, le système s'efforce même de réduire la facture énergétique de l'exécution, en la pré-programmant au fil des apprentissages. Ces processus sous-entendent la prépondérance d'un système de contrôle hiérarchisé et intégré.
De la même manière, personne ne peut réfuter, toutes techniques confondues, que le fait de toucher, de manipuler. produit, avant quoi que ce soit, une dépolarisation de mécanorécepteurs qui ouvre des canaux ioniques et envoie un influx nerveux parcourir la voie somesthésique vers le SNC. L'activité synaptique déclenchée peut alors être traduite en terme de sensation puis de perception, voir de perception de changement d'état du corps si la manouvre donnée est organisée en ce sens. Imagerie cérébrale à l'appui, il est de plus aujourd'hui connu que le fait de « toucher » à distance peut activer les mêmes circuits cérébraux pour générer un changement de représentation mentale du corps quasi identique ! Là encore, c'est bien le sens donné à l'information par le cerveau du sujet (ou par le couple praticien/sujet) qui est important. Prenons un autre exemple très simple : vous êtes vous déjà « autochatouillé » ? Impossible, bien que l'acte mécanique et ses effets sur les récepteurs sensoriels soient identiques au plan local. Par contre, il en va autrement quand le chatouillement est pratiqué par un tiers, parce que le cerveau ne lui attribue pas le même sens et que d'autres aires cérébrales sont activées. Éprouvez encore le bien être de l'ocytocine libérée par un massage placide du cuir chevelu chez votre coiffeur par comparaison à l'excitation qui accompagne la libération d'adrénaline d'une friction inopportune qui vous arrache les cheveux, etc.

Le contre-pied avec les pratiques habituelles est important : simple évolution ou véritable révolution ? En proposant un cheminement qui privilégie un travail en amont sur l'élaboration de la fonction, l'orthopractie prend de fait ses distances, aussi bien avec les thérapies manuelles privilégiant un travail sur la résultante structurelle, qu'avec l'énergétique ou les diverses réflexothérapies. Ces dernières par exemple louent la rapidité du réflexe alors qu'il semble finalement ne pas l'être autant que cela puisqu'il arrive trop tard pour contrer le déclenchement de l'entorse articulaire et qu'il affiche le handicap d'être stéréotypé et de pouvoir être inhibé par un réflexe concurrent. Du réflexe, il en faut pour éviter de se casser la figure, mais pour ce qui concerne le maintien postural, une activité réflexe de rattrapage obligatoirement dispendieuse d'énergie par une sollicitation anormale des fibres phasiques ne semble pas être un modèle physiologique tenable sur le long terme. Il n'est donc pas étonnant de voir aujourd'hui le modèle structurel être fortement remis en question par ses propres acteurs et le rejet des lois de Fryette ou des axes sacro-iliaques de Mitchell en sont l'illustration, alors que des décennies de manipulations ont été faites en leur nom. Et pourtant, ça marchait et ça marche même encore dans les mains de certains parce que c'est en fait de la « neuro » qui ne dit pas son nom !
Orthopractie et Posturologie
Concrètement, ces différentes structures et leurs interconnexions sont comparables à une tringlerie liant les différentes entrées sensorielles aux exécutants via des centres d'intégration et de régulation. Un fonctionnement normal suppose que le système a trouvé un point d'équilibre homéostasique propre à l'individu. Personne n'étant parfait, ce point mort est situé entre un point haut et un point bas autorisant la mise en place individuelle d'une certaine dose de compensation qui s'amenuise cependant au fur et à mesure que les conditions deviennent limites. Dès qu'un des couples (oil Dr/oeilG, vestibuleDr/vestibule G) se met à être conflictuel en son sein (asymétrie oculomotrice par exemple) ou vis-à-vis d'un ou des autres composants (oil/bouche, oil/oreille interne, Rachis/oil.), la tringlerie liant l'ensemble systèmes-fonctions se retrouve littéralement mise "cul par-dessus tête" par la sortie de route du contrôle cérébral : désorientation spatiale, déficience posturale et leur chapelet de symptômes s'installent sans que le sujet puisse en avoir conscience. De par notre place, nous sommes donc appelés à jouer un rôle essentiel dans la mise en évidence de ces conflits, dans leur prise en charge et/ou dans l'orientation du patient.
Comme ces pathologies n'ont qu'une épisodique corrélation anatomoclinique, il est suspecté que les conflits sensoriels qui président à leur origine sont la plupart du temps méconnus, ou à tout le moins fortement sous-estimés. Leur mise en évidence est le seul fait des tests cliniques et d'examens d'une discipline scientifique récente : la posturologie. La posturologie n'est pas un moyen de traitement mais un outil pour peser les variations du tonus postural d'un individu au moment T et dans un contexte environnemental donné. La démarche est d'utiliser une batterie de tests cliniques (Fukuda, Romberg postural.) agrémentés de variations concomitantes (Yeux ouverts/yeux fermés, bouche ouverte/bouche fermée dents en intercuspidation, pieds sur sol dur/sur mousse...) pour mettre en évidence les conséquences physiques (asymétries toniques, pseudo membre court, bascules/rotations de ceintures, fausse limitation d'amplitude articulaire, asymétrie crânio-faciale, défaut de convergence oculaire.) d'une/de perturbation(s) des boucles de régulation du contrôle posturo-cinétique.
La posturologie a pour cible un Homme qui a du mal à se tenir debout, (soit de l'appareil musculo-squelettique qui lui permet de résister à la pesanteur, soit du système de contrôle et de son régulateur d'énergie) ; l'orthopractie le laisse debout pour respecter et utiliser la neurophysiologie. Le contexte environnemental est le même : clinique posturologique et orthopractie sont fondamentalement liées.
Le praticien va donc devoir répondre à plusieurs nécessités :
- Mettre en évidence le conflit sensoriel par un testing sensibilisé des entrées sensorielles et le rendre « palpable » par le patient
- Libérer la(es) structure(s) contrainte(s) et/ou précontrainte(s)
- Retarer l'activité tonique posturale à l'origine de l'anomalie de contrainte en modifiant le codage des infos par le biais du canal somesthésique
- Réinitialiser la représentation spatiale du corps dans les cartes corticales pour avoir des post-effets durables
- Déterminer l'entrée sensorielle la plus impliquée pour organiser une prise en charge par collaboration avec les professionnels concernés.

En pratique, cela peut se résumer à 3 questions : Quel est l'état fonctionnel des boucles neurales du système de contrôle postural de ce sujet ? Étant donné ma profession, puis-je changer le codage des données neurosensorielles par les circuits cérébraux concernés avec mes mains ; par le toucher ? Le facteur gravitaire étant un élément fondamental du système, puis-je me donner les moyens de prendre en compte sa physiologie spécifique pour en faire un partenaire thérapeutique?
Travaux expérimentaux et cliniques montrent à ce sujet :
1) qu'il est tout à fait possible de créer des illusions perceptives par le toucher actif.
2) qu'il est possible d'utiliser le support de la neurophysiologique de l'Homme debout pour organiser bilans et orientation pluridisciplinaire.
3) que le véritable diktat imposé par une fonction antigravitaire aux mécanismes spécifiques oblige à se demander si le facteur gravitationnel ne peut pas passer du statut d'ennemi à celui de partenaire thérapeutique.
Dans cette optique, l'orthopractie soutient l'hypothèse que l'ouverture spécifique du canal somesthésique par les facilitation orthogrades des marqueurs posturosomatiques concernés permet une libération (immédiate et/ou retardée) des structures localement contraintes et un retarage conjoint (immédiat et/ou retardé) du système de contrôle postural. Les résultats et leur évolution dans le temps sont qualifiables et quantifiables, autant par les tests cliniques biomécaniques et/ou posturaux conventionnels, que par les mesures stabilométriques sur plate-forme de force et par des tests de tâches visuo-guidées dans le cas des troubles d'apprentissage.

Leurres sensoriels thérapeutiques
« L'illusion sensorielle, erreur des sens, est vérité de la perception » (Purkinje). Trompé par des informations sensorielles erronées, le système de contrôle peut donc être perturbé sans qu'un signal d'alarme apparaisse. Dès lors, peut-on imaginer prendre le cerveau à son propre piège, en retournant sa puissance contre lui ? Peut-on organiser l'illusion sensorielle, et dans ce cas "tromper le cerveau pour le guérir" ? La réponse est oui et elle suscite de nombreux travaux de recherche en Neurosciences et dans l'industrie (masque à réalité virtuelle.) au plan du pouvoir thérapeutique des processus de substitution sensorielle ou mieux de suppléance perceptive. Utilisant les propriétés de vicariance du système, le thérapeute va s'ingénier à remplacer en quelque sorte un sens par un autre. À titre d'exemple, il est possible d'évoquer les travaux expérimentaux de Bach y Rita/Sampaïo avec le TDU (Tong Display Unit) chez les non-voyants ou pour le guidage du geste chirurgical et ceux de V.Ramachandran dans le traitement des douleurs du membre fantôme des amputés. Dans ce cas, le stratagème consiste, par un jeu de miroirs, à tromper le cerveau en substituant des informations visuelles virtuelles à la disparition avérée des afférences tactilokinesthésiques du membre amputé. Le plus étonnant est que l'imagerie fonctionnelle cérébrale puisse montrer que l'amélioration des signes cliniques est corrélée à la relance de l'activité des circuits neuronaux de cartes corticales correspondant point par point au territoire du membre amputé. La correction du biais représentationnel du membre amputé par le leurre sensoriel a donc permis de faire taire le conflit sensoriel : le malade peut alors se réapproprier, sans en souffrir, un corps dont il manque pourtant toujours un morceau.

Tout ceci est l'essence même des manouvres sur les marqueurs posturosomatiques (peau, tendons, fascias, diaphragme, etc..) utilisées en orthopractie. En fonction de la qualité du geste, de sa profondeur, de son rythme.les mécanorécepteurs des différentes couches tissulaires intéressées sont dépolarisés pour transducter un flux de signaux sensoriels vers le SNC via le canal somesthésique. Là, ce qui n'était au départ qu'une simple stimulation physique va prendre d'autant plus de sens au fil des structures traversées, que le cerveau montre beaucoup de facilité à lui accorder un statut de réalité perçue. Le système est tellement réactif qu'il ne demanderait presque qu'à être trompé ! Quand le praticien a compris (senti avec la rétroaction informationnelle issue de son propre corps) et a acquis l'expérience qui lui permet de générer de tels effets avec ses mains, tout est en place pour que le cerveau d'un maximum de patients n'y «voit que du feu » et devienne acteur de sa propre « guérison », ou plus exactement de son propre retarage fonctionnel. Il ne reste plus au praticien qu'à prendre soin de laisser le malade en interaction avec sa physiologie antigravitationnelle pendant l'exécution des actes, pour ajouter le potentiel thérapeutique du facteur gravitaire et donner à ces actes un caractère interactif avec l'ensemble des fonctions de régulation homéostasique. C'est ainsi que nous avons fait le choix délibéré de retenir et de développer un panel de gestes techniques qui répondent au critère contextuel antigravitaire fondamental, en les distinguant au sein d'une somme de pratiques empiriques qui viennent très probablement de la nuit des temps tant la médecine manuelle a de toute évidence précédé la pharmacopée dans les sociétés humaines.

 

 

 

 

 

 

 

Dans les faits, quand le malade sent la peau de son dos et/ou des structures sous-jacentes bouger sous les doigts du praticien, son cerveau, en travaillant avant tout sur le sens qu'il donne à l'information, est victime d'un pseudo « effet Lackner » et traduit cette sensation en perception réelle. Pour lui, « la vertèbre a bougé : elle s'est remise en place ». Comme il se tient debout dans le même temps, son cerveau est mis en demeure d'ajouter en temps réel la dimension du contrôle antigravitaire du corps et de ses parties (donc de la vertèbre en question), aussi bien au plan sensorimoteur qu'en terme de consommation énergétique (Laporte, Massion, Duyssens.).
Le tour est joué. Les praticiens, tests appropriés à l'appui, ne s'étonnent pas plus de voir le(s) joint(s) articulaire(s) en question (intervertébral, articulaire, sutural.) retrouver une motilité fonctionnelle satisfaisante alors qu'il n'a pas été anatomiquement mobilisé, que de voir corps et système de contrôle retrouver des points d'équilibre fonctionnel plus compatibles avec la dynamique physiologique. Les résultats obtenus, leur durabilité, attestent que l'effet des manoeuvres est intégré à haut niveau cérébral.
Dans le cas où le conflit sensoriel est concomitant à un trouble organique, le patient doit bien entendu être conjointement orienté vers le spécialiste concerné (ophtalmologue, orthoptiste, dentiste, occlusodontiste, podologue.) puisque la levée de l'étiologie organique est un préalable au traitement fonctionnel. En pratique, il est judicieux que posturologie et orthopractie soient l'objet de réseaux multidisciplinaires.

Il apparaît donc fortement probable, si ce n'est inéluctable, que le concept manipulatif traditionnel (qu'il soit question de manipulation, d'ajustement, de dérangement mineur, etc.) puisse faire l'économie d'une évolution rapide vers une notion de facilitation neurosensorielle reconditionnant la perception du corps dans l'espace au sein des circuits neuronaux spécialisés du cerveau (cartes corticales).


Séance Type
Anamnèse « classique » et anamnèse « posturale » se succèdent au cours d'une 1ère séance pendant laquelle le système de contrôle postural est évalué au plan fonctionnel, tant en grandeur physique (morphologie, attitude.) qu'en activité sensorimotrice (testing biomécanique, palpatoire, kinésiologique.), en interrogeant les entrées sensorielles (oil, pied, oreille interne) ou les modulateurs (rachis, appareil dento-occlusal, intolérance aux métaux dentaires, cicatrices.) pour mettre en évidence un éventuel conflit sensoriel {anomalie fondamentale, traumatisme ancien, manipulation iatrogène (mauvaise correction d'amétropie, interventions dentaires intempestives...)} Ce bilan fonctionnel est suivi de la séance d'orthopractie proprement dite. En « entrant dans la plainte exprimée » et en passant par le rachis, les pieds, le ventre, la bouche, les muscles optomoteurs,.etc.., le praticien exécute une suite de manipulations spécifiques des tissus mous, sur les «marqueurs posturaux » détectés sur le corps du sujet concerné. C'est une séance « corps entier », sur un sujet laissé dans son programme d'éveil (station debout naturelle) à chaque fois que sa physiologie le lui permet. Au vu des résultats, il semble que cette séance spécifique de toucher haptique orthograde soumet le SNC à la prégnance toute particulière d'un flux somesthésique qui semble jouer le rôle d'un pool de leurres sensoriels à usage thérapeutique.
La durée de la séance varie de 20mn à 40mn.
Les premiers résultats sont immédiats, d'autres peuvent apparaître au bout de quelques jours et se poursuivre dans le temps en témoignant d'un « réamorçage » de la physiologie du système de contrôle: en règle générale, les séances ne sont pas répétitives à court terme mais leur rythme peut être marqué des variations interindividuelles.
La prise en charge des autres entrées sensorielles se fait en collaboration avec les autres professionnels de la filière de soins.


Indications
Au-delà des suites douloureuses traumatiques ou rhumatologiques (arthrose, discopathie, hernie discale..) qui sont les classiques de la thérapie manuelle, le territoire des pathologies fonctionnelles liées au(x) conflit(s) sensoriel(s) qui les précède(nt) le plus souvent, s'étend des troubles de la posture aux défauts d'apprentissage, en passant par les troubles musculosquelettiques, certains troubles de l'équilibre, l'économie du système neurovégétatif, etc. Inné ou acquis, SDP de Da Cunha et/ou Syndrome subjectif des traumatisés crâniens, séquelles neurosensorielles des agressions la vie moderne (stress.) et/ou effets iatrogènes de pratiques censées améliorer le quotidien (montures de lunettes tordues, amétropie non ou mal corrigée, travail à l'ordinateur avec des verres progressifs, effet prismatique des verres mal centrés, soins dentaires inappropriés, intolérance aux métaux dentaires, manipulations intempestives.), le champ d'application est immense ! Du bébé au senior en passant par la femme enceinte, tout le monde ou presque, peut être concerné et soigné dans la limite des indications. Les limites sont celles de la non intégrité organique innée ou acquise des circuits neuronaux (entrées sensorielles, voies afférentes et efférentes, centres d'intégration, effecteurs musculaires), de la non réversibilité et/ou de la non compensabilité des atteintes, ou encore celles de la non capacité du sujet à donner un sens adéquat aux données neurosensibles. Reste enfin la non moins indispensable qualité du thérapeute à créer du sens par le choix et la qualité des techniques qu'il décide de mettre en ouvre.

 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

Qui pratique?
Des professionnels de Santé ayant un pré-requis habilitant légalement au toucher thérapeutique (kinésithérapeutes, ostéopathes pour l'essentiel) et qui ont suivi une formation post-universitaire pour acquérir méthodologie et maîtrise du geste.

D'autres professionnels, écoles ou courants de pensée scientifique, proposent, en fonction de leurs domaines de compétence respectifs, d'autres types de facilitation des entrées sensorielles périphériques : prismes oculaires de basse puissance (2 à 3 dioptries) dits « actifs » (école de Lisbonne) par les OPH intéressés, semelles de stimulation podale proprioceptive pour les podologues, « semelles occlusales » et /ou ponçages de réharmonisation des appuis dentaires en occlusodontie. associés ou non à une rééducation posturale fonctionnelle spécifique (rééducation des praxies linguales, rééducation vestibulaire, Mézières, Mac-Kenzie, système Huber.) et à une prise de conscience des anciens et nouveaux schèmes corporels. Toutes ont cependant la même finalité : après prise en compte éventuelle d'une anomalie anatomofonctionnelle ou simplement fonctionnelle, faciliter une ou plusieurs des entrées sensorielles concernées pour modifier le codage des données neurosensibles par le système nerveux central. Le but est que le sujet concerné retrouve des stratégies de référencement spatiotemporel perdues (ou mal installées), ou qu'il puisse se réapproprier de nouvelles stratégies par le biais de compensations compatibles avec les différentes composantes de la physiologie du contrôle moteur. Rappelons que retrouver un corps confortablement stabilisé et équilibré dans l'espace est gage d'un fonctionnement libéré du poids du rattrapage volontaire, voir d'activités cognitives non amputées.

C'est ainsi que la technique de prismation oculaire de l'école de Lisbonne fait aujourd'hui débat, notamment dans la prise en charge d'une dyslexie de développement considérée par les promoteurs (Da Silva, Quercia) comme un aspect du syndrome de déficience posturale (désorientation spatiale) décrit par H.M.da Cunha. Au plan sémiologique, l'insuffisance de convergence est décrite comme trouble pathognomonique concomitant au biais du référencement égocentré. Le choix thérapeutique s'est donc porté sur une manipulation du référentiel égocentré via l'appareil oculomoteur. L'effet attendu de cette prismation par les OPH spécialisé est de provoquer un relâchement des muscles optomoteurs hypertoniques pour que les afférences proprioceptives du système visuel vers le SNC redeviennent congruentes. La prismation oculaire de basse puissance apparaît donc comme une façon particulière d'utiliser le canal somesthésique (proprioceptif) pour retarer le système de contrôle posturo-cinétique. Ses effets sont puissants et le montage verres/prismes doit faire l'objet d'une installation très précise et de contrôle extrêmement fréquents parce que les sujets ont souvent vite fait de tordre leurs montures. Par ailleurs, il est démontré que la prismation isolée ne marche pas et qu'elle doit impérativement être accompagnées d'autres activations du canal somesthésique par le port de semelles et d'une rééducation posturale pluriquotidienne.

 

 

 

 

Cette équilibration du tonus des muscles oculomoteurs fait bien entendu partie de nos préoccupations et nous utilisons de façon extrêmement courante des techniques spécifiques de facilitation adaptées à ces muscles.
Bricot préconise la pose d'un aimant pôle nord à l'aplomb du muscle droit externe hypertonique combinée à l'instillation vespérale de gouttes de correctol et au port de semelles de stimulation plantaire. Le « yoga des yeux » rassemble également un ensemble d'exercices qui sont une façon de détendre l'appareil oculomoteur, en ayant pour objectif de corriger certains troubles de la réfraction par cette relaxation des muscles intrinsèques et extrinsèques de l'oil.


L'occlusondontie n'est pas en reste et émet même l'hypothèse que tout commence non seulement par la bouche, mais surtout par les contacts dentaires : Les anomalies de positionnement, les prématurités. perturbent l'intégration des afférences sensorielles récupérées par la Vème paire crânienne pour induire, là aussi, un biais du référentiel égocentré. Cette fois, le défaut de convergence est considéré comme une conséquence. Que l'origine soit séquelle de soins dentaires iatrogènes, d'un trouble morphogénétique, etc., la prise en charge se fait par ponçage dentaire sélectif (Goidts), par gouttière et/ou reconstruction occlusale (Clauzade, Gaujacques, Nahmani...). Le but affiché est toujours le même : corriger l'asymétrie tonique et retarer le système de contrôle. Le canal somesthésique est donc encore à l'honneur puisque les dents sont pourvues de mécanorécepteurs générant des informations de type proprioceptif, mais ça se complique bigrement puisque Goidts prend le contre-pied de tout le monde en soutenant que c'est l'hypotonie qui est pathologique et que la prismation oculaire est plutôt une façon de parasiter le système. Il préconise une mesure de cette hypotonie par un test d'inégalité de longueur des bras, sujet en décubitus. D'autres professionnels soutiennent également que des intolérances aux métaux dentaires sont une source de pollution des afférences trijéminales et qu'elles peuvent avoir un retentissement identique.

La podologie exprime aussi sa volonté d'initier un retarage central via le canal somesthésique, que ce soit par le biais de semelles proprioceptives (Bourdiol, Bricot, Villeneuve..) ou à champ électromagnétique {Neurostab, à champ galvanique (Bricot), à réflecteur Infra Rouge (Lisbonne).), voir en y ajoutant des « manipulations somatiques informationnelles » qui ressemblent tellement à de la thérapie manuelle qu'on ne voit pas de différence.
Cet « informationnel » en deviendrait même une « tarte à la crème » pour certains: ne petite information par ci, une autre par là, un petit coup de réticulé par-dessus et en avant !!! C'est le cas en ostéopathie avec l'Intégration posturale ostéopathique transformée en Information posturale ostéopathique (J.M Boudard, « auteur » de la technique I.P.O) avec un auteur qui rajoute, comme par hasard, que le traitement du patient doit se faire en position debout !! Ce soi-disant auteur (promo orthopractie 2002) annonce à grand renfort de trompettes que l'abandon de ses habitudes manipulatives ostéopathiques au profit de manipulations homme debout vient qu'il a compris que l'efficacité de l'ostéopathie équine venait du fait que les chevaux étaient manipulés debout.Ben allons ! Ce type d'«auteur » qui emprunte bien entendu aux autres sans citer ses sources, gagnerait à se souvenir, entre autre, que si le cerveau humain ne travaille que sur le sens qu'il peut et/ou veut donner aux données sensorielles parce qu'il a un cortex (reprenez l'exemple du chatouillement), celui des autres animaux et pour le cas celui du cheval, est loin d'en faire autant. C'est encore la méthode Niromathé (Th. Vandorme/promo orthopractie 2003) qui reprend aujourd'hui l'argument selon lequel la peau est pour l'essentiel de la représentation consciente du corps et propose une série de manouvres d'information du SNC par le canal somesthésique.De trente à cent milliard de neurones, un milliard de milliards de connexions possibles montées en réseau flexible.que ce soit par le bon vouloir de l'évolution ou du Bon Dieu, l'Homme ne s'est pas retrouvé doté d'un système aussi complexe pour qu'il se contente d'information brute.

Nous avons certainement beaucoup de chance que ce canal somesthésique soit aussi le vecteur thérapeutique privilégié des médecines manuelles et de la kinésithérapie, que ce soit par le biais des manipulations, de la rééducation, des différentes techniques de massage ou de toucher thérapeutique. Compte tenu des résultats observés, du vécu des patients, du rapport efficacité/coût/réversibilité d'éventuels effets secondaires, il semble hautement recommandable de commencer à prendre en charge nombre de ces patients «en y mettant les mains d'abord », soit pour accompagner les autres professionnels dans leur effort de manipulation des entrées sensorielles, soit pour privilégier en 1ère intention un réafférencement du système de contrôle par des techniques de facilitation somesthésique orthograde boostant la prégnance du flux proprioceptif par la puissance du facteur gravitaire. Ces choix se justifient, entre autre, par le fait que changer la perception de la position d'un bassin, d'un rachis, etc. dans l'espace induit une modification conjointe de la façon dont les autres récepteurs codent leurs positions relatives et parce que la physiologie de la fonction antigravitaire laisse très clairement entendre que les manipulations couchées ne peuvent absolument pas donner les mêmes résultats que les facilitations tactilokinesthésiques, Homme debout, de l'orthopractie. Mais attention ; vues de loin, toutes les techniques utilisant le toucher comme vecteur thérapeutique se ressemblent au point d'en être volontiers confondues par le patient lambda. Il faut être averti pour saisir des différences qui sont pourtant fondamentales. Dans la réalité, l'orthopractie ne semble pas, par exemple, pouvoir être assimilée à une forme d'ostéopathie, de chiropraxie.qui serait orthograde, parce qu'au plan conceptuel, un monde de neurophysiologie les séparent. Aux professionnels de le savoir et de le faire savoir.
J'utilise ces techniques depuis bientôt 40 ans et je soutiens cette approche neurophysiologique depuis 20 ans : le GRETM en a organisé la transmission du savoir depuis plus de 10 ans auprès d'un millier de professionnels. En France comme à l'étranger, des milliers de patients de tout âge sont soignés chaque jour et l'orthopractie fait la preuve de son efficacité. Compte tenu de l'évolution des connaissances, ce qui paraissait incongru hier provoque même aujourd'hui une rapide prise de conscience dans le monde professionnel. C'est ainsi qu'après la publication de Duyssens (2005) et son commentaire par l'un des pères de la posturologie moderne (Gagey 2006), chacun a pu lire dans une très récente revue professionnelle que « l'utilisation en situation de rééducation des positions de travail horizontales, constitue au regard de la stimulation anti-gravidique un non-sens sensori-moteur donnant ainsi les limites neuro-physiologiques de certaines activités gymniques.» (Chatrenet/FMT n° 80). Il suffit d'ajouter qu'au plan « manipulatif », c'est encore beaucoup plus vrai !

Les techniques, la méthodologie existent. La profession a tout ce qu'il faut pour faire valoir ses compétences et devenir un acteur princeps des équipes pluridisciplinaires qui parleront un langage commun et seront à même de proposer une prise en charge « multi-sens », tant il est vrai qu'aucune des entrées sensorielles n'apparaît en mesure de jouer le rôle de capteur miracle. Avec un rapport durée d'apprentissage/coût/efficience/physiologie que nous souhaitons optimal, nous vous proposons donc d'explorer ces nouveaux territoires par une formation gratifiante qui vous donnera les arguments pour vous les approprier et pour donner du sens à un quotidien thérapeutique répondant à l'attente de vos patients.

 


Comment en est-on arrivé là ?